4 conseils pour améliorer sa stratégie de recrutement, avec le Head of Talent Acquisition de BAM (groupe Theodo)
- Par
- Pollen
- Publié le
- 14/05/2024
- Temps de lecture
- 8min
Un processus de recrutement efficace peut être un levier stratégique majeur au sein d'une organisation. Louis le Mouel rejoint BAM en tant que Coach Agile et Business Developer. Après ses succès en recrutement, il devient Head of Talent Acquisition et s’implique largement dans la croissance de l’entreprise. En utilisant la méthode Lean il recrute 180 personnes, soutient la croissance de BAM (35% par an) et obtient un taux d'acceptation des offres d’embauche de 90%.
Dans cet entretien accordé à Pollen, Louis revient sur sa vision stratégique de l’entreprise et ses conseils pour utiliser le lean au service des talents et employeurs.
Louis peux tu nous présenter rapidement ton parcours, ta vision, ce qui t’anime dans le recrutement ?
Mon parcours commence par une expérience entrepreneuriale en sortie d’école, puis chez BAM (Groupe Theodo) que j’ai rejoint en 2018. J’ai d’abord eu l’opportunité de travailler avec des clients pour développer des applications mobiles avec des équipes tech, et après quelques mois, j’ai voulu m’impliquer dans la croissance de l’entreprise, par le biais du recrutement et du mentoring, un univers qui m’a tout de suite passionné.
Le recrutement est un secteur hautement stratégique, qui permet de s’impliquer sur des sujets transverses. C’est particulièrement vrai pour BAM qui s’inscrit avec Theodo dans un écosystème plus large, constitué d’interlocuteurs, de produits, de marchés et de données différentes. En 2019, je suis passé Head of Talent Acquisition. J’ai aussi eu la chance de m’impliquer de façon plus large sur la croissance du groupe, en accompagnant les autres Head of Talent Acquisition du groupe.
On évoque souvent le lean management à l’origine du succès du groupe Theodo. Comment l’applique tu dans ta vision du recrutement, et comment t’aide-t-il à recruter les meilleurs talents ?
L’étoile du nord du lean management c’est d’atteindre et de maximiser la satisfaction totale des clients. Cet objectif se traduit par le fait de développer les gens pour qu’ils soient meilleurs au quotidien.
La méthode est née au Japon et développée par Toyota dans les années 50s. Aujourd’hui, on lui prête une connotation négative mais à l’origine il s’agit d’un concept qui permet de disposer des outils adaptés pour identifier un problème concret, l’analyser et développer un ensemble de solutions. Lorsqu’on évoque par exemple le Kanban, le Kaizen, le management visuel, tous ces outils s’inscrivent dans cette même dimension : développer les talents pour qu’ils soient meilleurs dans leur métier.
Le lean permet d’identifier la valeur délivrée à un client et d’observer les éléments sur lesquels il est nécessaire de s’améliorer. Lorsqu’on l’applique au recrutement, on conserve la même ambition. Gérer son recrutement comme on gère une organisation de vente, avec deux typologies de clients principaux.
D’un côté, les clients externes, autrement dit les candidats, de l’autre les clients internes, autrement dit, les personnes pour lesquelles on est chargés de recruter.
Le lean permet de se recentrer sur le coeur de l’activité de l’entreprise. Quels sont les problèmes que ce recrutement doit nous aider à résoudre ? Est ce que l’on cherche à vendre plus ? Est ce qu’on souhaite livrer un code de meilleure qualité ? Est ce qu’on a besoin d’être plus performant en R&D ? Il est capital de s’interroger sur la valeur fondamentale du recrutement pour notre client interne avant même de se lancer dans l’exercice du sourcing.
Le second client, c’est le candidat. Il est nécessaire de travailler le produit le plus attractif pour le convaincre. Lorsqu’on recherche un CEO ou un COO par exemple, il est important que les outcomes de la discussion soient bien définis et les objectifs du poste suffisamment intéressants pour déclencher l’intérêt du candidat.
Une fois les attentes de chaque partie définies, le lean nous permet de mener le recrutement dans le contexte le plus adapté, en gaspillant le moins de ressources possibles et en développant au mieux chaque profil.
Quelle est la condition nécessaire pour réaliser un bon recrutement grâce au lean ?
La meilleure façon d’apporter de la valeur à ses clients en tant que recruteur, c'est d’être parfaitement clair sur ce que l’on recherche et le problème que l’on souhaite résoudre. Ce travail peut paraitre simple de prime abord. “Je recherche un sales pour améliorer mes ventes”. Mais en réalité, il y a un veritable effort d’introspection, d’itération et une véritable prise de recul pour aller à la source du problème.
Lors d’un recrutement, chaque candidat rencontré doit permettre de renforcer un peu plus la compréhension de cette problématique, en utilisant les feedbacks réalisés par l’ensemble des équipes, hiring managers, dirigeants, ainsi que tous les interlocuteurs amenés à rencontrer le candidat. Ces éléments permettent d’autant plus d’affiner la compréhension du poste. Puis, avec l’expérience, le recruteur analyse plus vite et devient plus attentif à certains détails clefs.
Quels sont les plus qui font un bon recruteur ?
Pour être un bon recruteur, il faut se pencher sur la compréhension de l’expérience candidat. À nouveau, la méthodologie du lean intervient. La première question à se poser est la suivante : “est ce que l’échange que j’ai avec mon ou ma candidate va lui apporter de la valeur ?
Il est très facile de tomber dans le biais classique du recrutement. “C’est moi l’employeur, c’est moi qui décide, vous devriez tous avoir envie de venir chez moi.”
Or, le recrutement n’est plus aussi vertical qu’il a pu l’être, en particulier quand on s’adresse aux meilleurs profils. Ces derniers ont aussi un ensemble d’attentes et d’aspirations personnelles. La qualité d’un bon recruteur réside dans sa capacité à concilier les attentes de chacun, non pas en fantasmant la réalité mais bien en s’assurant que ce que l’on vend coincide effectivement avec ce que le candidat recherche. Je passe mon temps à répéter à mes recruteurs, “votre métier, c’est de les aider à définir leurs besoins, de rencontrer les personnes qui vont résoudre les problématiques de l’entreprise, de les aider à grandir et à constituer des équipes qui fonctionnent”. Un recruteur qui n’a pas la volonté d’aider son candidat n’est pas un bon recruteur. Un recruteur qui n’est pas au claire sur les problèmes à résoudre, risque de recruter un profil qui n’est pas adapté, de consacrer 6 mois à sa formation, avant de constater que la mayonnaise ne prend pas. Ce qui nous mène au constat suivant :
- Des ressources mal exploitées pour l’entreprise
- Une expérience négative pour l’employé.
Quelle place prend l’entretien dans le recrutement ?
Dans le meilleur des mondes, l’entretien nous permet de prédire si le candidat va réussir ou non dans le job. En réalité, c’est une opportunité précieuse de récolter de la donnée et de comprendre ce qui est attendu du candidat en regard des objectifs, des problématiques et de la culture de l’entreprise.
Lorsque je débute un entretien, je définis toujours des livrables à 6, 12, 18 mois, pour mieux cerner les compétences essentielles que le candidat doit posséder pour réussir dans son métier. Celles-ci ne se limitent pas à l’expertise technique ou aux connaissances spécifiques du secteurs. Elles incluent la capacité à s’intégrer dans la culture de l’entreprise, à collaborer efficacement avec les équipes en place.
Au fil des entretiens, je récolte un ensemble de verbatim, les réponses des candidats, dont certaines sont brillantes et d’autres médiocres. En utilisant des outils de prise de note et de transcription automatique lors des entretiens, je peux capturer facilement des extraits de nos conversations qui offrent des éclairages précieux sur le comportement et les réflexions du candidat. Je qualifie les réponses insuffisantes et les réponses excellentes selon les critères établis, ce qui me permet encore d’affiner ma compréhension du poste, voire de la faire évoluer, selon certains retours que je n’avais pas même envisagés.
Un entretien est comme une pièce de théâtre. Il y a le texte, le sous-texte, la posture. Il y a de l’asymétrie d’information, des rapports de forces, de la séduction. Ce qu’il faut garder en tête en tant que recruteur, c’est l’objectif final. J’étais avec une recruteuse junior dernièrement. Nous revenons sur l’analyse de son call et je lui dis : “tu as vu, là tu parles beaucoup plus que lui, alors que c’est un call pour le qualifier. C’est bizarre. Puis ici, il te répond cette phrase. Pourquoi ne pas rebondir avec cette question là ?” Le savoir-faire du recruteur, c’est de connaitre précisément - au delà de la scène qui se joue face à lui - ce qu’il doit obtenir comme information, comment l’obtenir et comment l’analyser.
Les recos de Louis :
- Un podcast à écouter : Au coeur de l’histoire de Virginie Giraud, rien à voir avec le recrutement mais passionnant
- Un livre à lire (pro ou perso ) :
- Une personnalité / leader qui t’a inspiré : Andrew Grove, patron d’Intel sur son approche du management
- Un conseil qui t’a accompagné tout au long de ta carrière ? Le job d’un recruteur c’est d’AIDER ses candidats
- Un process, rituel de recrutement qui ne te quitte plus : Coacher ses candidats, j’ai l’impression de les léser quand je ne le fais pas.